L'équipe Interaction de l'Institut des Systèmes Intelligents et de Robotique (ISIR) s'intéresse depuis quelques années à l’approche sensori-motrice de la perception. Cette approche s’oppose fondamentalement à l’approche de modélisation classiquement utilisée en robotique dans laquelle le système est modélisé, par l'ingénieur, via un ensemble de lois et de paramètres directement tirés des lois physiques. Le modèle ainsi obtenu est alors fortement dépendant de la pertinence et de la concordance des paramètres avec la réalité physique. L’approche sensori-motrice considère au contraire le système du point de vue intrinsèque, où toute structure est induite des dépendances entre ses entrées (sensations extéroceptives) et ses sorties (commandes motrices). L'objectif de l'équipe Interaction est d'appliquer cette approche, déjà partiellement théorisée par des recherches en neurosciences, psychologues et mathématiciens, au cadre concret de la robotique.
L’objectif des travaux menés à l'ISIR jusqu'à présent consiste à formaliser, mathématiquement et de manière algorithmique, les processus qui permettent à un agent totalement naïf --c’est à dire sans connaissances a priori sur sa structure cinématique ni sur l’environnement-- d’extraire la structure de l’espace physique dans lequel il est immergé. Ceci est rendu possible par la corrélation entre ses actions motrices et l’information obtenue par ses capteurs. Dans le contexte de la théorie sensori-motrice de la perception telle que décrite par Kevin O’Regan, une telle structure extraite de sensations brutes non interprétées découle naturellement sur la notion de percept spatial et donc de perception de l’espace. Une première approche consiste à faire découvrir à l’agent naïf, par apprentissage, des notions structurelles sur son propre système sensori-moteur. Une fois ces structures internes découvertes,
il est alors possible à l’agent d’y projeter les évènements extérieurs, liés à son interaction avec son environnement, et ainsi d’en déduire une représentation structurée. Des travaux récents de l'équipe montrent qu'une telle représentation peut être extraite via l’analyse du flot sensori-moteur de l'agent.
Cette proposition de stage s'inscrit dans la continuité de ces travaux. En effet, l'équipe a récemment proposé une formalisation mathématique élégante des liens unissants les commandes motrices aux invariants sensoriels. Cette formalisation a été exploitée pour permettre à un agent naïf de construire, sans aucune information a priori, une représentation "interne" de son propre corps. L'idée est de poursuivre ces travaux en introduisant cette fois la modalité visuelle, et d'étendre la formalisation mathématique avec l'idée qu'il est possible de "toucher" son propre corps ldots via la vision. Un robot, de type humanoide, peut en effet profiter de l'inclusion de son propre corps dans son champ visuel pour construire une représentation interne de son espace péripersonnel. Au delà de l'aspect mathématique, il s'agira également de travailler sur un simulateur numérique réaliste, s'appuyant par exemple sur ROS et Gazebo, et permettant de générer facilement des données motrices et sensorielles nécessaires à l'analyse du flux sensorimoteur. Un portage sur un vrai robot est envisageable selon l'avancée des travaux.
<strong>Sera demandé selon la direction suivie :</strong>
- un état de l’art détaillé ;
- une formalisation théorique du problème inspirée des contributions récentes de l'équipe ;
- l'utilisation d'un simulateur numérique, sous ROS/Gazebo ou toute autre solution, d'un robot humanoïde doté de capacités motrices et visuelles (typiquement, un robot Nao) afin de collecter des données sensori-motrices;
- l'analyse des données sensori-motrices résultant des simulations.
<strong>Prérequis :</strong>
- un goût prononcé pour les travaux fondamentaux ;
- programmation Matlab, Python ou C++. Des connaissances de base en ROS sont un plus ;
- idéalement, de bonnes connaissances des méthodes pour l'apprentissage et la reconnaissance de formes ;
- bonne maitrise de l'anglais.
<strong>Modalités :</strong>
Durée : 4 à 6 mois, début avant mai 2018 ;
Le stage se déroulera au sein de l’Institut des Système Intelligents et de Robotique, dans l’équipe Interaction, groupe Perception Active Multimodale ;